Benoni Devigne (1844-1870)
Un enfant de Bertry
Il est des existences qui s’effacent trop tôt, laissant à peine la trace d’un nom sur une page d’archive.Ce sont souvent celles-là qui m’attirent. A travers elles, se révéle la fragilité de la vie humaine et la force mystérieuse du destin.
Benoni Devigne fait partie de ces jeunes hommes . Né à Bertry en 1844, mort à Chagny en 1870, il n’a vécu que vingt-six années — mais son parcours traverse la moitié du XIXᵉ siècle, entre exil, espoir et guerre.
De Bertry à Rivoli (Oran)
Benoni voit le jour le 7 mai 1844 dans une famille modeste de tisseurs : Charles Louis Devignes et Anne Rosalie Marlière.
Les époux auront cinq enfants : trois filles et deux garçons. Le premier, Abraham, meurt à l’âge de trois ans.
Ces prénoms, Abraham et Benoni, tous deux empruntés aux Écritures, laissent à penser — sans certitude — que la famille était peut-être protestante.
Comme beaucoup d’autres familles du Nord, les Devigne cherchent à échapper à la misère et à la crise du textile, se laissant séduire par les promesses d’une vie nouvelle portées par la jeune colonisation algérienne. Ils embarquent pour l’Algérie, devenue territoire français en 1848 et s'établissent à Rivoli. C’est là, au milieu des colons et des pionniers, que grandit Benoni.
A 20 ans sonnés, comme tous les jeunes hommes français, il est soumis à la conscription, par tirage au sort. Son numéro le désigne : il doit servir. Benoni est incorporé au 92e régiment d’infanterie, 2e bataillon, 6e compagnie.
De l'Algérie à la France
En 1870, la guerre éclate entre la France et la Prusse. L’Empire s’effondre, la République naît dans la tourmente, et les régiments se dispersent au gré des batailles.
Le 92e régiment d’infanterie prend part à plusieurs affrontements dans l’Est et le Centre.
Le 20 novembre 1870, la petite ville de Chagny, en Saône-et-Loire, devient le théâtre d’une bataille acharnée. Les troupes prussiennes y affrontent les mobiles français dans les rues mêmes du bourg. Les blessés affluent dans les écoles et les maisons transformées en hôpitaux.
C’est sans doute là que Benoni est atteint.
Il meurt le 29 décembre 1870, à l’hôpital de Chagny, loin des siens.Aucune veuve n’a pleuré Benoni — il était célibataire. Aucun enfant n’a hérité de son nom.
Peut-être sa famille, en Algérie, n’a-t-elle même jamais su exactement où il avait rendu son dernier souffle. Son corps repose quelque part en Bourgogne, loin du Nord et loin du soleil d’Oran
Date de dernière mise à jour : Mar 30 sept 2025
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