Mortelle rencontre au Pont de Busigny
"Toute ressemblance avec des faits et des personnages existants ou ayant existé n'est absolument pas fortuite !"
Chaque 3ᵉ samedi du mois, je participe au Rendez-vous ancestral, un défi d’écriture où l’on remonte le temps à la rencontre d’un personnage présent dans notre arbre généalogique. Une fiction basée sur des données réelles. Pour m’y aider, j’ai créé, voici deux ans, le personnage d’Osyne, chroniqueuse pour la gazette Cetaitautemps.
Mon moyen de transport ? Ce petit pot en verre et métal, du XIXe siècle, autrefois confiturier ou sucrier, aujourd’hui mon fidèle "Portoloin". Tel la lampe d’Aladin, il me relie à mes arrière-grands-parents et m’ouvre la porte du passé.
En gare d'Honnechy
Comme chaque mois, la généalogie m’emmène dans un improbable voyage dans le temps.
Cette fois, c’est à la gare d’Honnechy que je prends pied. Je reconnais immédiatement les lieux. La batisse en briques, le quai désert. Quand j’étais étudiante à Valenciennes, je prenais le train ici chaque lundi matin. Aujourd’hui c'est Osyne, chroniqueuse pour la gazette "C’étaitautemps" qui vient au village.
Si je suis là, c'est pour enquêter sur un drame.
Un homme fauché par le train
Le bruit m’est parvenu, par une coupure de journal : Un homme a été fauché par un train.
Nous sommes à l'été 1861. Il me faut en savoir plus, pour cela je vais devoir remonter jusqu'au village, dont la gare est éloignée.
Heureusement les foudres des cieux se sont apaisées, mais on distingue dans les champs les stigmates du violent orage qui a sévi dans la semaine. Les blés sont versés. Le chemin pavé de grès qui mène au village s'avère glissant de boue. Osyne fais attention où tu poses les pieds !
Quel lieu plus propice qu'un estaminet pour connaître toutes les nouvelles d'un village ? Je me dirige donc vers celui de la place. Y règne une certaine animation, c'est jour de marché. Je sors mon calepin sur lequel je consigne tout ce que mes oreilles entendent pendant que je sirote mon demi de bière.
Edouard Afchain
C'est bien "l'Edouard", qui est mort, l'un des fils Afchain. Il avait une cinquantaine d'années (en réalité 52). Vieux garçon. Il habitait chez la veuve Delaby.
J'interviens auprès de mes voisins pour connaître les circonstances de l'accident. On me raconte :
Ce jeudi 27 juin, il est parti au champ de sa logeuse pour sarcler des chicorées. Mais vers cinq heures du soir, le ciel s’est fâché : l'orage avait éclaté et une pluie torrentielle, mêlée de grêle, s'est abattue, qui l'a obligé à quitter précipitemment son travail.
Pour rentrer au village il lui fallait passer sous le Pont de Busigny, mais comme d'habitude, et plus encore cette fois, le chemin etait devenu impraticable, submergé par la boue. Prendre un autre chemin était impensable, cela revenait à faire un détour de deux kilomètres dans le déluge. Edouard a donc décidé de prendre la ligne droite : il est monté sur la voie ferrée pour traverser.
Il n’a pas vu venir le train express venant de Belgique, filant vers Paris à toute vitesse et parce qu'il était sourd, il ne l'a pas entendu non plus. Il a été percuté de plein fouet, renversé et broyé par la locomotive. C'est un employé des chemins de fer, un certain Hugues Petit, qui a trouvé le corps au bord de la voie, au niveau du Pont de Busigny
Le drame a été consigné à la mairie par acte officiel. Deux témoins, Émile Poincet et Adolphe Ternois, ont reconnu le corps et raconté ce qu’ils savaient.
Epilogue
J’ai fouillé dans les registres pour reconstituer sa filiation. Édouard était le quatrième des cinq enfants du couple Alexis Afchain et Adélaïde Afchain. Une fratrie du début du XIXe siècle, bien enracinée à Honnechy, village souche de ce patronyme. C'est un de mes collatéraux, nous l'avons vu dans le premier article des Rameaux cachés, notre ancêtre commun est Pierre Afcin.
L'acte de décès s'avère tout à fait exceptionnel, par la richesse des informations qu'il contient, il s'apparente à procès verbal d'accident.
Par contre, je n'ai pas retrouvé l'acte de naissance. Aucune mention non plus dans les tables décennales. L’année supposée ? 1809, d’après l’acte de décès. Mais entre 1805 et 1815, aucun acte ne le mentionne dans les registres d’Honnechy. J'en conclus qu'il est probablement né, inopinément, lors d'un déplacement de sa mère dans un village voisin.
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Date de dernière mise à jour : Jeu 26 juin 2025
Commentaires
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- 1. Catherine Livet Le Dim 22 juin 2025
Terrible ! -
- 2. Briqueloup Le Dim 22 juin 2025
Quelle imprudence ! C'est terrible d'être sourd . -
- 3. Christiane Bruneau Le Sam 21 juin 2025
quelle histoire ! -
- 4. VERONIQUE ESPECHE Le Sam 21 juin 2025
J'ai presque honte de parler de chance au sujet de l'acte de ce décès accidentel et tragique ... Mais quand même ... Quelle chance
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