Angèle Lenglet et Marcel Offelman
De Münster à Bertry.
Ce voyage qui va, au début du XIXe siècle, conduire Elisabeth Offelman d’Allemagne jusqu’en France est à la fois une épopée, qui nécessite de traverser les Pays-Bas et la Belgique, et en même temps un voyage pas si long, puisqu’il fait moins de 400 km.
Comme un clin d’œil de l’histoire, la ville fut une première fois assiégée par les troupes françaises du marquis d’Armentières en 1759, au cours de la guerre de Sept Ans. Elle subit alors d’importantes destructions.
Puis arrive la Révolution française qui va diffuser dans plusieurs pays riverains.
Maria Katharina Elisabeth OFFELMAN.
C’est en 1784 que naît à Munster, Maria Katharina Elisabeth OFFELMAN.
Nous ne savons pas grand-chose de sa famille, à l’exception de ce que nous apprend son acte de décès, son père s’appelait Josef et sa mère Maria Katharina Henriette. Nous ignorons si elle avait des frères et sœurs.
Elle est baptisée dans l’Eglise St-Ludgéri, un des plus anciens édifices sacrés catholiques du Münster.
Son enfance sera baignée par les bouleversements que connaîtra sa région natale. C’est ainsi qu’à la Révolution, au moment de la Convention, en 1793, certaines provinces allemandes comme la Rhénanie émettent librement le vœu de se rattacher à la France, incorporation au nom de "l’avantage mutuel des deux parties".
Rappelons la « déclaration de paix au monde » du 22 mai 1790 :
«La nation française renonce à entreprendre des conquêtes contre la liberté d’aucun peuple ».
Ce vœu pieu ne durera pas face à la contre-révolution qui se met en place. Pour garder et consolider ses acquisitions la France durcit les conditions d’occupation des territoires rattachés. Dès 1797, la Rhénanie est gérée comme le reste de la France, institutions, administrations sont identiques.
L’éducation est réorganisée, la langue française introduite dans les écoles.
Elisabeth y a-t-elle appris le français ?
Elle a 20 ans, en 1804, lorsqu’est dessiné le célèbre jardin botanique autour du Château du Prince Evêque.
A-t-elle parcouru ses allées romantiques, avec un jeune homme, Français ou Allemand ?
Toujours est-il qu’elle donne naissance en 1808 à une petite fille prénommée, comme sa grand-mère Marie Catherine Henriette.
Dans le laps de temps très court que représente « l’épisode » napoléonien pour l’histoire européenne, les séquences se succèdent très rapidement, l’empereur ne cessant de remodeler le continent au gré de ses victoires successives, puis de ses défaites cinglantes. C’est ainsi que la petite cité de Münster qui est à l’origine rattachée au groupement des villes de la Hanse se trouve rattachée à la Prusse en 1802, puis à la France en 1810, avant de devenir le chef-lieu de Westphalie en 1816, après la chute de l’Empereur et le Traité de Vienne en 1815.
Est-ce à ce moment-là qu’Elisabeth prend la décision de quitter son pays natal ? A-t-elle suivi son amoureux ou a-t-elle fui l’opprobre, la honte et le déshonneur d’être fille-mère?
Autant de questions qui resteront sans réponse, à moins de trouver, dans les archives nationales, un dossier, une hypothétique demande de naturalisation.
L'arrivée en France
C’est dans le village de Clairfontaine, dans l’Aisne entre La Capelle et Hirson, que nous retrouvons la trace d’Elisabeth et de sa fille Catherine. Elle se sont placées « sous la protection » du garde-champêtre du village Jean Antoine Desson.
Sans avoir trouvé de lien particulier avec cette personne, je ne peux que signaler la présence de plusieurs Desson, dont un originaire de Clairfontaine, dans les armées Napoléoniennes.
Jean Maurice Desson, conscrit de l’An X, que l’armée raye des contrôles, après avoir perdu sa trace après un séjour à l’hôpital . On peut supposer qu’il est mort. Pur hasard que ces patronymes identiques ? Chacun décidera.
Lorsque la jeune Catherine va « tomber enceinte » c’est sous ce patronyme de Desson que seront déclarés les trois enfants successifs qu’elle aura d’un père inconnu, les deux premiers enfants seront déclarés par le « beau-père », Jean Antoine.
Catherine finira par s’éloigner de Clairfontaine pour mettre au monde, à l'hopital de Laon, son dernier fils : Louis "César" Alexandre, le grand père de Marcel.
Catherine finira par se marier, à Paris, avec un dénommé Pierre Cabaret en 1862, c’est vers cette époque qu’elle et ses enfants feront rectifier les actes d’état civil et reprendront leur patronyme d’OFFELMAN.
Quant à Elisabeth, elle se sépare de Desson après que sa fille aura accouché du 1er enfant. Elle restera à Clairfontaine où elle décédera en 1868.
"César " Offelman et ses descendants
Il se marie à 27 ans, en 1865, avec Ferdinante Sylvie Stephanie CLOUX, originaire de Luzoir dans l’Aisne. Le couple s’établit dans le petit village où le chef de famille gagne chichement sa vie comme manouvrier, c’est-à-dire ouvrier agricole, journalier. Neuf enfants naîtront de cette union, dont Edouard, le père de Marcel , né en 1876.
Nous restons en Thiérache, c’est à Mondrepuis, que le jeune homme rencontre la femme de sa vie, Marie Adelina DARGENT. Edouard sera cantonnier aux Chemins de fer du Nord. Le couple déménagera au gré des mutations le long de la ligne de chemin de fer. Dans l'entre-deux guerres ils demeurent à Bohain. Deux des cinq enfants du couple s’établiront à Bertry.
Le vie à Mondrepuis n'était pas toujours un long fleuve tranquille, comme en témoigne l'article de presse ci-contre.
Marcel Offelman
Marcel, voit le jour en janvier 1906 dans le village de Wallers-Trélon encore appelé Wallers en Fagne dans l’Avesnois. Il est l’élément central d’une fratrie de cinq, composée de quatre garçons et une fille. Il ne connaîtra pas son frère aîné mort à l’âge de deux ans.
Ses parents, Edouard et Adelina, se sont mariés en 1900, c’était ce que l’on nomme « la belle époque ». Celle qui allait mener notre société traditionnelle et artisanale à la modernité. Le pays était alors à moitié moins peuplé qu’aujourd’hui. Son mode de vie différait totalement entre la ville qui bénéficiait déjà du progrès et les communes rurales qui n’étaient pas encore équipées en électricité et eau courante. La voiture et le téléphone existaient mais étaient également réservés à une frange très riche de la population.
C’est malgré tout une belle époque, parce qu’elle est synonyme de paix, de progrès et de prospérité. Tout s’effondrera en 1914, mais revenons-en à Marcel.
Son enfance se déroulera à Glageon, village niché dans le bocage au cœur de la petite Suisse du Nord. C'est là que naîtront ses deux frères cadets Maurice et Léon.
En âge de travailler, il débutera sa vie professionnelle comme ouvrier briquetier, avant d’intégrer la Compagnie des Chemins de fer du Nord, l’une des plus vieilles de France, crée en 1845.
A 20 ans, sous le matricule 559, il passera le conseil de révision. Je ne puis en dire plus, les fiches matricules de cette année n’étant pas encore en ligne.
Les mouvements familiaux, suivront la ligne de chemin de Fer, c’est ainsi qu’ils se retrouveront à Bohain où Marie Madeleine Offelman, épousera le bertrésien Jean Baptiste Lenglet en 1924. Un an plus tard Marcel Offelman épousera Angèle Lenglet la sœur de Jean Baptiste. Il s’agit d’une double union, frère et sœur mariés à frère et sœur.
Angèle Lenglet
Née en 1904, elle est la benjamine des six enfants d’Auguste Lenglet et Marie Rosalie Moreau, mariés en 1890.
Si la branche maternelle Moreau provient de Saint-Aubert, la branche Lenglet reste de souche bertrésienne depuis moult générations. La sédentarité semble une marque de fabrique dans notre famille.
Je dis « notre » famille, parce qu’Angèle m’est apparentée. Nos premiers aïeux communs sont François Lenglet marié à Nathalie Druon, un couple de tisseurs mulquiniers.
Le charretier tient une place à part dans le monde rural. Chargé de soigner les chevaux, de les conduire aux voitures et aux instruments auxquels on les attelle. Son talent consiste à bien connaître les chevaux et à les diriger de la voix et du geste, en les faisant marcher avec régularité. Ses gages sont généralement plus élevés que ceux des autres ouvriers agricoles.
De ce couple naîtront six enfants, dont Louis César Lenglet, né en 1806. Il exercera le métier de charretier.
Il épouse en 1829 une jeune orpheline Sophie Raoux.
Sophie naît à Paris en décembre 1804, de Jean Pierre Raoux, 47 ans, ouvrier en orfèvrerie, et Anne Gaudé, 28 ans. Elle est la seconde enfant du couple.
Six mois après sa naissance, sa mère meurt. Le père plus âgé, dans l’incapacité de s’occuper des enfants, va les placer en nourrice. Il décède en 1812. C’est ainsi que Sophie arrive à Bertry,
Louis César et Sophie auront dix enfants. La pauvre jeune femme meurt précocement à l’âge de 45 ans.
Ce sont les arrière-grands-parents d’Angèle Lenglet.
Bien que de souche bertrésienne, Rosalie habite Troisvilles, c’est là que naît, peu de temps avant leur mariage, le premier enfant du couple, le 25 décembre 1854.
Naître le même jour que Jésus est souvent considéré comme une grâce, une chance. Ce ne sera pas le cas du petit Auguste qui mourra trois ans plus tard. Entretemps, le couple s’est marié et est revenu vivre à Bertry.
Près d'un an après la mort du petit Auguste, Rosalie, de nouveau enceinte, accouchera à l’été 1858 d’un petit garçon, qui s’appellera également Auguste.
Le nécronyme : de nos jours, en France, cette pratique a été pratiquement abandonnée pour des motifs liés à la psychologie infantile. Mais il fut un temps pas si lointain où l’on donnait à un enfant le prénom de son frère, ou de sa sœur, mort(e) en bas âge, dans l’idée d’entretenir la mémoire du disparu et dans la pensée que cet ange au ciel veillerait sur son puîné.
Auguste Lenglet est le père d’Angèle. Il sera terrassier. En 1890, il épouse Marie Rosalie Moreau. Des six enfants du couple, seuls les quatre derniers atteindront l’âge adulte.
Angèle et Marcel élèveront cinq enfants. Léon, Marcel, Jean, Ginette et Jeannine naissent entre 1925 et 1940.
Angèle meurt d’une longue maladie en 1958 à l’âge de 53 ans. la benjamine de la famille n’a que 18 ans. Marcel, veuf, lui survivra jusqu’en 1985.
Ci-dessous, la photo du couple avec ses deux filles a été prise quelques temps avant que la maladie emporte Angèle.
Je remercie Carine Victoire Offelman qui m'a confié la photo et la mission de parler de ses grands parents. J'espère m'être acquittée honorablement de cette tâche, malgré un petit retard dans l'exécution du projet.
Avec toute mon amitié.
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Date de dernière mise à jour : Mar 26 nov 2024
Commentaires
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- 1. VERONIQUE ESPECHE Le Sam 07 déc 2024
Good job !!! plaisant à lire
Si je n'aimais pas tant écrire, je te confirai mes ancêtres -
- 2. JMarie Delacour Le Mer 04 déc 2024
Bonjour Dominique,
C'est un très beau cadeau que vous faites à celles et ceux qui ont des branches alliées à cette famille OFFELMAN, que j'ai découvert récemment. Une soeur de mon arrière grand-mère paternelle, Philimène Amande DESQUILBET, s'est mariée avec Délice Charles Edmond OFFELMAN en 1898 à Anox. C'était la fille de Louis César Alexandre OFFELMAN.
Je ne manquerai pas de vous citez dans mon arbre.
Bien cordialement. -
- 3. William Le Jeu 28 nov 2024
Bonjour Dominique
Magnifique description de la famille OFFELMAN / LENGLET
Très beau travail -
- 4. William Le Jeu 28 nov 2024
Bonjour Dominique
Superbes recherches et très joli descriptif des OFFELMAN & LENGLET
Encore bravo-
- Dominique LENGLETLe Jeu 28 nov 2024
Merci beaucoup William, cela me va droit au cœur
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- 5. Taisne jean Claude Le Mar 26 nov 2024
J'étais en classe de 6 ieme avec Marie France offelman qui s'est mariée avec André Lefort . Je pense que c'est la famille, elle me disait que sa grand mère était garde barrière .-
- Dominique LENGLETLe Mar 26 nov 2024
Bonjour Jean-Claude. Tout à fait, Marcel était le grand-oncle de Marie-France, fille de Madeleine
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